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La petite bande courut à travers champs, et après plusieurs jours de marche et de périls, arriva à Montargis, où résidait Renée de France, fille de Louis XII, veuve d’Hercule d’Est. Cette princesse, huguenote comme les fugitifs, leur offrit son château pour asile, et le soir à la veillée, le petit Agrippa, assis à ses pieds sur un carreau de soie, la charmait par le récit naïf de ses aventures.

[Illustration : Agrippa d’Aubigné danse devant le bûcher ou l’on va le jeter]

Il fallut quitter la bonne princesse et se remettre en route. Le seigneur d’Aubigné commandait à Orléans pour ceux de sa religion. Le vieux Béroalde s’était juré de ramener l’enfant à son père. Après bien des périls ils arrivèrent aux portes de la ville assiégée. Mais là un spectacle horrible les attendait. Ils avaient pris la fuite pour échapper à la mort et ils la rencontraient plus hideuse, plus menaçante : les cadavres jonchaient les places et les rues ; des maisons ouvertes s’échappaient des gémissements ; les soldats osaient à peine se montrer sur les remparts pour faire leur service : la peste ravageait Orléans.

[Illustration : Agrippa d’Aubigné raconte ses aventures à Renée de France.]

» N’entrons pas, dit maître Béroalde ; ici la mort est certaine.

— Entrons, répondit Agrippa ; ici est mon père, et je veux partager tous ses dangers. »

Ils franchirent les portes, et bientôt ils eurent rejoint le seigneur d’Aubigné.

» Ici, toi ici, mon pauvre enfant ! s’écria celui-ci. Je ne t’ai donc retrouvé que pour te perdre !

— Non, mon père, je vivrai et je me battrai auprès de vous, » dit l’enfant toujours serein et ferme.

Cependant le fléau l’atteignit. Son père le vit un jour