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Les trois hommes assis auprès du feu n’échangeaient aucune parole, comme s’ils eussent craint de troubler le petit savant ; mais d’un sourire ou d’un signe ils se communiquaient leur surprise et leur contentement. Ce fut l’enfant qui rompit le premier le silence.

» J’ai fini, dit-il en se levant et en remettant le cahier au plus âgé des trois personnages ; voyez, mon père, si vous êtes content.

— C’est à messire Henri Étienne [1] d’en juger, répondit le père, prenant son fils sur ses genoux et tournant au feu ses petites jambes ; chauffe-toi, mon enfant, pendant que ton précepteur suivra sur le texte grec, et que messire Étienne relira ta traduction et s’assurera qu’aucun contre-sens ne t’est échappé. »

[Note 1 : Petit-fils du premier imprimeur de ce nom.]

L’enfant hocha la tête pour dire qu’il était bien sûr de lui, et remit avec un sourire d’espérance son cahier à Henri Étienne.

Maître Béroalde le précepteur se leva, prit le gros volume grec qui était sur la table, et s’étant incliné :

» Je suis aux ordres de M. Étienne, » dit-il, et ses yeux se fixèrent sur la page ouverte.

Le célèbre imprimeur commença la lecture du cahier de l’enfant, dont les boucles blondes se jouaient sur l’épaule de son père tandis qu’il écoutait.

Ce n’était point un conte de fée, ce n’était point un thème facile et court qu’Henri Étienne, le typographe le plus renommé de l’époque, était venu collationner avec tant d’attention : c’était un des fameux dialogues de Platon, le Criton, que le petit Agrippa d’Aubigné s’était exercé à traduire » Bien, très-bien ! disait le savant imprimeur