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Tandis que je parlais, je voyais dans la tête
Du choc de tes pensers s’agiter la tempête,
Et lorsque quelques mots lumineux t’échappaient,
Comme venus d’en haut, poète, ils me frappaient.
Tu m’as dit : « Tous ces maux ont de vieilles racines,
» D’un monde qui n’est plus nous portons les ruines,
» Notre âge où la raison verse un souffle divin
» Des siècles corrompus conserve le levain.
» Ce peuple dont l’aspect attriste et décourage
» Des fers garda l’empreinte en sortant d’esclavage ;
» Par ses maîtres longtemps à servir façonné,
» Libre, il redoute encor ceux qui l’ont enchaîné ;
» Oubliant que lui seul est la force vivante,
» L’ombre des pouvoirs morts l’abuse et l’épouvante ;
» À ces débris croulants il tremble de toucher,
» Et sans lisière encore il n’ose pas marcher.

» La faute en est à ceux qui font ses destinées :
» Nous voyons, remontant le courant des années,
» Au passé tout pouvoir essayer de s’unir,
» Méconnaître son siècle et craindre l’avenir.
» Et comme cependant nulle force n’enchaîne
» L’essor libre et hardi de la pensée humaine,