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Oh ! laisse à ton esprit mon esprit s’éclairer,
Écoute, et suis mes pas qui pourraient s’égarer.

J’allais loin de Paris, l’âme remplie encore
De l’espoir généreux de l’idéale aurore
Que pour le peuple un jour on verra se lever ;
J’allais rêvant ces temps que l’on aime à rêver,
Et, le regard ému, cherchant partout le germe
Du sublime avenir que la France renferme.
Les splendeurs des cités, les monuments romains,
Ruines du passé qui parent nos chemins,
N’attiraient pas mon cœur ; le passé, tombe immense,
Ne pouvait m’éclairer sur l’ère qui commence.
Partout j’interrogeais la génération
Dans le peuple ; et d’abord l’ouvrier de Lyon,
Créature épuisée, être chétif et blême,
Se présentait à moi comme un sombre problème :
Dans la ruelle étroite et haute où jamais l’air
Ne pénètre l’été, ni le soleil l’hiver,
L’ouvrier naît, travaille et meurt dans l’indigence,
Sans que le pâle éclair de son intelligence
Lui montre qu’il a droit à des destins meilleurs.
Ce n’est que par le corps qu’il ressent les douleurs ;