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pour que je sois tentée de le connaître ; il est un proverbe triste et vrai : Chaque jour porte sa peine ! Eh 1 si tous les jours de notre vie nous étaient à l’avance connus, aurions-nous jamais la force d’en supporter le fardeau ? La Bohémienne m’écoutait attentivement ; je poursuivis : — Si, à quatorze ans, au lieu des riantes illusions qui nous attirent à la vie, nous étions tout à coup frappées du tableau des souffrances, des déceptions, des douleurs morales et physiques qui sont le lot de la femme ici-bas, pauvre mère, je vous le demande, aurions-nous la force de vivre, de nous dévouer et de nous résigner enfin ? La Bohémienne parut réfléchir ; mais, après une minute de silence, elle posa sur le gazon son nourrisson endormi, Ut deux o(u trois bonds et me dit gaîment : — Je n’aime pas à penser, ça m’attriste : imitez-moi, j’aurais pu tout de même vous prédire un beau sort, ça vous