Page:Colet - Deux mois d emotions - 1843.djvu/12

Cette page n’a pas encore été corrigée

rien, où déjà s’élèvent à demi les forts détachés  ; constructions encore inachevées qui, à distance, ont l’aspect pittoresque de vieilles constructions en ruine ; enfin, à l’horizon, comme un cadre au tableau, les verdoyants coteaux aux pentes insensibles qui bornent au midi la campagne parisienne. Cette vue imposante d’une cité reine, digne d’être reproduite par le pinceau de Martinn, cette vue, qui par un soleil éclatant est si belle et si animée, était ce soir là d’une accablante tristesse  : sombre anomalie  ! Dans ce mois de juin, où d’ordinaire on respire des flammes, une pluie glacée kiondait les arbres, les toitures et les monuments  ; je voulus un instant résister à son irritante influence ; mais le froid de l’athmosphère me gagna, je fus contrainte de refermer ma fenêtre, et je me mis à rêver dans un fauteuil. Ma pensée s’envola où elle va toujours quand le travail ne l’absorbe pas, vers ce berceau que j’aime, vers ces terres où le soleil n’a que des voiles passagers qui se fondent dans ses flots de feu, où le sang bout, où l’ame se réchauffe à la chaleur du sang, et ne connaît pas ces heures froides et inertes qui sont un avant-goût de la tombe. Attirée vers ces régions brûlantes, je me rappelais les deux mois de