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choix qu'en avoit le pourvoyeur du roy d'Angleterre, qui décrioit et mettoit à vil prix le résidu de nos denrées où il n'auroit pas mis sa marque, comme aussy par l'inégalité des poids et mesures, si fort condamnée dans l'Écriture, et par laquelle, néanmoins, ils ne donnent qu'au poids particulier et ne reçoivent aucune marchandise que dans des balances publiques beaucoup plus fortes.

Pour remettre le commerce, il y a deux choses nécessaires : la seureté et la liberté.

La seureté dépend d'une mutelle correspondance à empescher les pirates et courses des particuliers, qui, au lieu de s'appliquer en leur navigation à l'honneste exercice du commerce, rompent avec violence le lien de la société civile par lequel les nations se secourent les unes les autres en leurs nécessités. Cette seureté ne se peut establir que par des défenses respectives, dans les deux Estats, de faire des prises sur les marchands des deux nations ; et parce que le prétexte du commerce que nos alliés font avec nos ennemis en portant leurs effets dans leurs vaisseaux a donné occasion à des vaisseaux françois d'attaquer les Anglois et que les confiscations ont est é fondées sur cette raison par une explication qu'on a donnée à l'ordonnance de François Ier, en l'an 1543, sur le fait de l'Amirauté, art. 43 ; néanmoins, il semble qu'il vaut mieux consentir que les Espagnols et autres nos ennemis tirent cette commodité par le moyen de nos alliés, pourvu que les Anglois s'obligent à obtenir le mesme privilége pour nos marchands quand ils passeront, devant les armées d'Espagne, leurs effets dans des vaisseaux anglois, pour ne pas (pour causer un dommage de peu de conséquence aux Espagnols) donner occasion à la continuation d'une piraterie qui ruine le commerce, estant certain que jamais des vaisseaux de guerre ne visitent des marchands sans laisser des marques de la rapine des soldats, qui n'ont pas la modestie de se retenir, trouvant facilité à prendre ; l'inconvénient qu'on peut trouver que, sous la couverture de nos alliés, les sujets de nos ennemis fassent quelque profit, se pouvant remarquer tous les jours encore plus grand par la facilité que les propres sujets du roy y prestent sans qu'on les en puisse empescher.

Cette déclaration (interdiction) réciproque aux vaisseaux de guerre des deux nations d'arrester, sous quelque prétexte que ce soit, les vaisseaux marchands, qui défendoient aussy l'etnrée des ports aux forbans et corsaires, pour vendre leurs marchandises, avec injonction d'un sévère chastiment à ceux qui en achèteroient, à quoy les gouverneurs des places et des ports, capitaines et officiers de la marine seront obligés de tenir la main, fait qu'on ne doute point que la cessation des hostilités ne remette en peu de