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vu ce moule mouillé ; j’avoue que le piſé en ſéchant ſe raffermit ; mais c’eſt plus par la cauſe de la ſuppreſſion de l’air pendant ſa maſſivation que par celle de ſon humidité.

Venons toujours aux faits : j’ai l’expérience que dans un ſeul jour on peut bâtir trois pans de mur les uns ſur les autres, ayant chacun environ trois pieds ; on éleve donc un mur de terre ſans interruption & dans une ſeule journée de 8 à 9 pieds de hauteur, c’eſt-à-dire, de la hauteur d’un étage : j’ai auſſi la preuve qu’à l’inſtant que les maçons piſeurs ſont arrivés, dans la conſtruction d’un bâtiment de piſé, à l’élévation néceſſaire pour y poſer un plancher on place les poutres les plus lourdes ſur les murs de terre tout fraîchement faits : j’ai encore la preuve qu’on peut poſer la plus groſſe charpente d’un toit auſſitôt que les murs des pignons en piſé viennent d’être parachevés. Ces manœuvres, que j’ai mille fois fait faire dans les bâtimens de terre que j’ai conſtruits, annoncent que le piſé ne tire ſa conſiſtance que du coude des ouvriers, c’eſt-à-dire, de la force du travail ou de la maſſivation bien faite de la terre.

D’après toutes ces pratiques & expériences, on peut admettre pour principes ; 1o. que le piſé n’acquiert de ſolidité que par la maſſivation dont l’effet eſt une diminution de ſon volume & de la ſuppreſſion de l’air ; 2o. que ſa durée de plus de deux cents ans ne provient que de l’évaporation parfaite de la portion de ſon humidité naturelle ; 3o. que le gluten de la terre cauſe le rapprochement intime & la criſpation de toutes ſes particules à l’inſtant que les coups redoublés du battoir opèrent artificiellement, ſemblable à cette adhéſion naturelle, qui s’opère pour la formation des pierres & que l’homme ne définira jamais ; car qui peut voir cette création des pierres,