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LES CAHIERS

ces beaux chevaux, tous gris-pommelés. Je n’osais parler à ces Morvandiaux ; je pétillais de joie. La queue n’était pas encore passée que voilà ces messieurs qui arrivent dans la cour avec trois chevaux. « Eh bien, mon petit garçon, et notre bidet, comment va-t-il ? — Il est superbe. — Mettons pied à terre, voyons cela. Comment ! il est bien guéri. Il faut le remettre à notre garçon pour qu’il l’emmène, il n’est pas encore passé. »

Et leurs chevaux défilaient toujours. Leur piqueur passe : « François, prenez votre bidet, suivez les chevaux ! »

Ma sœur paraît, ces messieurs la saluent : « Madame, combien vous est-il dû pour la nourriture de notre cheval ? — Douze francs, messieurs. — Les voilà, madame. — N’oubliez pas le garçon. — Cela nous regarde. »

Ma sœur m’aperçoit que je sortais le cheval : « Tiens, dit-elle, tu es habillé en dimanche. — Comme tu vois. — Comment ! à qui parles-tu ? — À toi. — Comment ? — Eh ! oui, à toi. Tu ne sais donc pas que ton domestique est ton frère. — Par exemple ! — C’est comme cela. Tu es une mauvaise sœur. Tu nous as laissés partir moi et mon frère, et mon petit frère et ma petite sœur, mauvaise sœur que tu es. Te rappelles-tu que tu as coûté trois cents francs à ma mère pour apprendre le métier de lingère chez Mme Morin ? Tu n’as pas de cœur. Ma mère