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LES CAHIERS

Je quittai ces messieurs le cœur bien gros. On me dit en arrivant : « Tu as été bien longtemps. — Dame ! ils m’ont mené bien loin, ces messieurs-là. Voilà une lettre qu’ils ont donnée pour vous, et de l’argent et des assignats pour aller à Auxerre chercher un cheval qui est malade. — Ah ! ils ne se gênent pas, ces messieurs. — Dame ! voilà la lettre ; ça vous regarde. »

Il lit la lettre : « Eh bien, tu partiras à trois heures du matin ; tu as quatorze lieues à faire demain. »

De la nuit je ne ferme l’œil, ma petite tête était bouleversée de tout ce qui venait de m’arriver. Je fais mes sept lieues en cinq heures, j’arrive à huit heures du matin chez M.  Paquet ; je trouve mon cheval bien portant, je présente ma lettre, et l’on m’envoie chez le vétérinaire, qui donne un reçu de son payement. Je reviens à l’hôtel, je règle avec M.  Paquet, je pars pour Druyes, et j’arrive à sept heures à la maison, bien fatigué. Faire quatorze lieues dans un jour à douze ans, c’était trop pour mon âge. Enfin je soigne bien mon cheval ; je lui fais une bonne litière, et je vais souper. Je remets les reçus et trois francs du reste de l’argent de ces messieurs, et je vais me fourrer dans ma paille. Oh ! comme j’ai dormi. Je n’ai fait qu’un somme.

Le lendemain, j’ai pansé mon cheval Je plus propre possible, et j’ai déjeuné. « Tu vas battre à la grange, me dit mon beau-frère. — Ça suffit. »