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nous irons voir mes enfants ; puis demain nous monterons à cheval avec votre domestique, car vous avez changé de rôle. Ce n’est plus notre petit Jean d’autrefois, c’est le beau capitaine. Que de plaisir je me réserve en vous présentant à mes amis ; ils ne vont pas vous reconnaître. »

En effet, arrivés chez ces gros fermiers, et reçus partout à bras ouverts : « Je viens, disait M. Potier, vous demander à dîner pour moi et mon escorte. Je vous présente un capitaine qui est venu me voir. — Soyez tous les bienvenus », répondait-on ; et comme j’étais militaire, on me parlait le plus souvent des ravages qu’avait faits l’ennemi en envahissant les environs de Paris. Jusqu’au dîner, M. Potier ne disait rien de moi : ce n’est qu’après le premier service qu’il demandait à nos hôtes s’ils ne connaissaient pas l’officier qu’il avait amené. Chacun regardait avec de grands yeux, mais personne ne me reconnaissait. « Vous l’avez cependant vu chez moi pendant dix ans, reprenait M. Potier. C’est l’enfant perdu que j’ai ramené de la foire d’Entrains, il y a vingt ans. C’est lui que je vous présente aujourd’hui. Il n’a pas perdu son temps, comme vous voyez. Il m’avait dit en partant : Je veux un fusil d’argent. Il a rempli sa promesse, car il en a gagné un la première fois qu’il a été au feu, et vous le voyez avec la croix d’honneur et le grade de capitaine, attaché à la personne du grand homme… aujourd’hui déchu.