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nible service, et nous reçûmes l’ordre de nous présenter chez le général Boudin pour aller prendre le préfet et nous rendre à la cathédrale. L’église était pleine ; après le service, M. l’abbé Viard monta en chaire, le général nous fit signe de sortir du chœur pour nous mener en face de la chaire. Nous formions le cercle tous assis, notre général au milieu de nous. L’abbé Viard lut le testament de Louis XVI d’une voix de Stentor ; après sa lecture, le voilà qui tombe sur l’usurpateur Bonaparte qui avait porté le carnage chez toutes les puissances avec ses satellites, ces buveurs de sang qui égorgeaient les enfants au berceau. Alors toutes les figures des vieux guerriers devinrent pâles, et le général, qui aurait dû venir à notre secours, ne dit mot. En sortant de cette cérémonie, tout le monde était silencieux ; je croyais étouffer de colère contre l’abbé Viard ; il m’a fait une si terrible blessure que je n’ai été depuis aux cérémonies que forcément. Voilà ce que j’ai vu et entendu ; que les hommes de ce temps s’en souviennent ! Il fallut que nous restâmes humiliés, il fallut aller à la messe tous les dimanches, je croyais toujours voir cette tête blanche, aux cheveux regrichés, monter en chaire. Je crois que je serais sorti de la cathédrale, tant cet homme me faisait mal à voir.

Un jour de Fête-Dieu, nous fûmes chez notre général, de là chez le préfet attendre le