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fus en face de cet immense ravin, je vis des colonnes d’infanterie réunies en masses serrées dans sa partie basse ; je le dépassai, j’appuyai un peu à droite, et arrivai près d’une baraque isolée, à peu de distance de la route. Je m’arrête pour regarder : sur ma droite, je voyais de grands seigles et leurs pièces en batterie, mais personne ne bougeait, je fis un peu le fanfaron ; je m’approchai de ces grands seigles, et vis une masse de cavalerie derrière ; j’en avais assez vu.

Il paraît qu’il ne leur convenait pas de me voir approcher d’eux ; ils me saluèrent de trois coups de canon. Je m’en reviens rendre compte à l’Empereur que, sur la droite, leur cavalerie était cachée derrière les seigles, leur infanterie, masquée par le ravin, qu’une batterie m’avait salué. L’Empereur donna l’ordre de l’attaque sur toute la ligne ; et le maréchal Ney fit des prodiges de courage et de bravoure. Cet intrépide maréchal avait devant lui une position formidable ; il ne pouvait la franchir. À chaque instant, il envoyait près de l’Empereur pour avoir du renfort, et en finir, disait-il. Enfin le soir, il reçut de la cavalerie qui mit les Anglais en déroute, mais sans succès prononcé. Encore un effort, et ils étaient renversés dans la forêt ; notre centre faisait des progrès, on avait passé la baraque malgré la mitraille qui tombait dans les rangs. Nous ne connaissions pas les malheurs qui nous attendaient.