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passait devant la garde et disait : « Je compte sur vous pour me faire de la place pour arriver à Francfort. Tenez-vous prêts ; il faut leur passer sur le ventre. Ne vous embarrassez pas de prisonniers ; passez outre, faites-les repentir de nous barrer le chemin. C’est assez de deux bataillons (un de chasseurs et un de grenadiers) et deux escadrons de chasseurs et deux de grenadiers ; vous serez commandés par Friant. » Et il se promenait, parlait à tout le monde, mais les traînards n’étaient pas bien reçus. Tout cela se passait dans un grand bois de sapins qui nous dérobait aux regards de l’ennemi ; mais nous avions affaire à un plus fort que nous ; l’armée bavaroise qui nous était opposée sur ce point comptait plus de quarante mille hommes. L’Empereur donne le signal ; les chasseurs partent les premiers, les grenadiers ensuite. L’ennemi formait une masse imposante. En voyant partir mes vieux camarades, je frissonnais. Les grenadiers à cheval, avec toute la cavalerie, font un mouvement en avant. Je me porte vers l’Empereur : « Si Sa Majesté me permettait de suivre les grenadiers à cheval ? — Va, me dit-il, c’est un brave de plus. »

Que je fus content de ma hardiesse ! jamais je ne lui avais rien demandé ; je le craignais trop. Nos vieux grognards à pied arrivent sur cette masse qui les attendait de pied ferme de l’autre côté d’un ruisseau qui traverse la grande