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les cahiers

Je pars bien monté et bien escorté. Dans la forêt, je trouve le régiment campé. Je présente mon ordre au colonel. Aussitôt lu, il dit : « Donnez votre cheval, adjudant-major, c’est l’ordre de l’Empereur ! dessellez son cheval, ça presse. »

Je comptais trouver les stations de cavalerie dans le bois, mais pas du tout, toutes s’étaient sauvées ou étaient prises. Je me trouve seul sans escorte, je réfléchis ; je ralentis le pas, je vois à une distance éloignée de moi, sur une éminence, de la cavalerie pied à terre ; je me range sur le côté pour ne pas être aperçu, car c’était bien des cosaques qui attendaient. Je longe au plus près du bois tout à coup ; il sort du bois un paysan qui me dit : Cosaques !

Je les avais bien vus ; sans hésiter, je mets pied à terre, et saisissant mon pistolet, j’aborde mon paysan, lui montrant de l’or d’une main, et mon pistolet de l’autre. Il comprit, et me dit : Toc ! toc ! ce qui veut dire : « C’est bon. » Remettant mon or dans la poche de mon gilet, tenant mon cheval avec la bride passée au bras, pistolet armé dans la main gauche, je tiens de la droite mon Russe qui me conduit par un sentier. Après un long détour, il me ramène sur ma route, en me disant : « Nien ; nien, cosaques ! »

Je reconnais alors mon chemin en voyant des bouleaux ; tout en joie, je donnai trois napoléons à mon paysan et montai à cheval. Comme je