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Je n’étais jamais surpris. Tout roulait sur moi : l’exercice des consignés, cinquante vélites à faire manœuvrer, et mon réfectoire à conduire. Toutes mes heures étaient prises ; à force de m’appliquer, je justifiai la bonne opinion de mon capitaine. Je puis dire que je lui dois le morceau de pain que j’ai gagné au champ d’honneur. — Voilà la fin de 1810.

En 1811, des réjouissances nous attendaient ; le 20 mars, un courrier arrive à notre caserne annoncer la délivrance de notre Impératrice et dit que le canon allait se faire entendre. Tout le monde était dans l’attente ; aux premiers coups partis des Invalides, on comptait en silence ; au vingt-deuxième et au vingt-troisième, tous sautèrent de joie ; ce n’était qu’un cri de vive l’Empereur ! Le roi de Rome fut baptisé le 9 juin, on nous donna des fêtes et des feux d’artifices. Cet enfant chéri était toujours accompagné du gouverneur du palais lorsqu’il sortait pour se promener avec sa belle nourrice et une dame qui le portait. Me trouvant un jour dans le château de Saint-Cloud, le maréchal Durée qui m’accompagnait me fait signe de m’approcher, et ce cher enfant tendait ses petites mains pour prendre mon plumet, je me penche et le voilà qui déchire mes plumes. Le maréchal me dit : « Laissez-le faire. » — L’enfant éclatait de joie, mais le plumet fut sacrifié. Je demeurai un peu sot. Le maréchal me dit : « Donnez-le-lui, je vous