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Les chefs firent venir une grosse tonne de vin de Suresnes qui ne leur coûtait pas dix centimes la bouteille, et ils en donnèrent une bouteille par homme. Tout marchait de front, les trous et les massifs, et ces belles plantations de huit mille sept cents arbres et arbrisseaux furent faites par les consignés.

Je fus complimenté par mes chefs, et on jeta les yeux sur moi pour tenir la pension des sous-officiers. C’était une affaire sérieuse de faire préparer et bien servir le repas de cinquante-quatre sous-officiers. J’étais payé d’avance, ce qui me faisait (par jour) la somme de 45 fr. 70 c. Les surcroîts de bénéfices étaient par jour : primo le pain (8 fr. 10 c.) ; le vin (8 fr. 10 c.) ; les plats fournis hors du réfectoire (3 fr.) ; le bois (1 fr.). Le dimanche, tous partaient pour Paris, ce qui faisait 21 fr. 20 c. ajoutés aux 45 fr. 70 c., ci 06 fr. 90 c., que j’avais par jour a dépenser. Je pouvais faire face à tout et les contenter. Au bout du mois, je fis voir ma dépense au sergent-major. « Mais, me dit-il, vous êtes en arrière. — Pas du tout, j’ai un bénéfice de 21 fr. 20 c. par jour qui, avec mes 45 fr. 70 c., fait 66 fr. 90 c. — Mais vous ? — Moi, j’ai 64 fr. 50 c. par mois. Cela me suffit. Avec trois jours de bénéfice, je paie mon chef et mes deux aides. Ainsi, soyez tranquille ; la pension marchera. »

Les sergents dirent à dîner : « Il faut pousser à la consommation pour faire marcher notre