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LES CAHIERS

mon trente et un, il me fallut des bas de soie pour porter l’épée. J’ai dit déjà que j’avais passé à Saint-Malo[1]. Je n’avais point de mollets, il fallut avoir recours à des faux. J’allai au Palais-Royal pour me les procurer, je trouvais mon affaire que je payai 18 francs, ce qui me fit une jambe passable, avec une paire de bas fins sur les faux mollets, et les bas de soie (en troisième). Je fis les visites de rigueur, et je fus comblé de politesses sur ma bonne tenue. Je rentrai à la caserne le soir à neuf heures, satisfait de ma journée, et je trouvai une lettre de mon capitaine Renard qui m’invitait pour le dimanche à dîner chez lui, sans faute à cinq heures précises, disant que son épouse et sa demoiselle voulaient me voir pour me remercier d’avoir fait coucher mon capitaine dans un tonneau le soir de la bataille d’Austerlitz.

Je me rendis à cette invitation, je trouvai là des militaires de distinction, des bourgeois et des dames de haut parage[2]. J’étais gêné avec mes supérieurs, tous décorés, et de si belles dames, avec des plumes ! Que j’étais petit dans ce beau salon en attendant le dîner ! Mon capitaine vint à mon secours, me présenta à son épouse, à ces dames et à ses amies. Je ne me trouvai plus isolé, mais j’étais bien timide, j’aurais préféré ma pen-

  1. Allusion a la chanson connue : Bon voyage, M. Dumollet, etc., etc.
  2. N’oubliez pas que c’est un sergent qui parle.