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de munition de trois livres chacun. Je me mets à genoux devant mon sac, je l’ouvre, je prends un de mes pains, et le place dans mon sac. Pour l’autre, je le partage en morceaux. Il faisait si nuit que personne ne me vit. « Que faites-vous ? » dit mon capitaine Renard.

Lui prenant la main, et y mettant un morceau de pain, je lui dis : « Silence ! gardez mon sac et mangez… Je vais chercher du bois. »

Je partis avec quatre hommes de mon ordinaire, et nous trouvâmes une pièce de canon braquée devant le château. Nous démontâmes la pièce et nous apportâmes les roues et les affûts. Arrivés près de notre capitaine avec ces morceaux monstrueux, nous fîmes un feu pour toute la nuit. Quelle bonne nuit ! Nous fûmes nous cacher, nous deux mon capitaine, pour nous régaler de ce bon pain. Je lui dis : « J’en ai un dans mon sac, vous aurez votre part demain soir. »

Le lendemain, nous partîmes pour prendre à droite dans des sables et des bois, et voilà un temps affreux, neige, pluie et dégel. Voilà le sable qui plie sous nos pieds, et l’eau qui surnage sur le sable mouvant. Nous enfoncions jusqu’aux genoux. Il fallait prendre des cordes pour attacher nos souliers sur le cou-de-pied, et quand nous arrachions nos jambes de ce sable mouvant, les cordes cassaient et les souliers res-