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m’embrasser. « Halte-là ! lui dis-je, je n’aime pas les baisers de Judas. Retirez-vous, vous êtes une horreur pour moi. — Allons ! mon fils, dit mon père, assieds-toi là. Pourquoi n’es-tu pas venu chez ton père ! — Je ne voulais pas y recevoir l’hospitalité sous les yeux de votre femme que je déteste. Des étrangers m’ont offert un asile par amitié ; je l’ai accepté. Je vais faire ma visite à M. le Maire, et demain je viendrai vous voir à midi, si vous le permettez. — Je t’attendrai. »

Je partis pour monter à la ville, et je trouvai la foule qui m’attendait à mon passage, disant : « Le voilà, ce cher M. Coignet ; il n’a pas perdu son temps, il a une belle croix, le bon Dieu l’a béni à cause de toutes les souffrances que sa belle-mère lui a fait endurer. — Laissez-moi ! leur dis-je. Je vous verrai tous, mes bons amis ; laissez-moi monter à la ville chez M. Trémeau. »

Je fus reçu à bras ouverts chez M. Trémeau, qui dit : « Vous avez votre couvert mis chez moi, et nous vous mènerons à la chasse avec mes frères pour vous désennuyer ; vous portez votre port d’armes sur votre poitrine. — Je vous remercie, je viendrai vous voir. »

Quel baume pour moi que cet accueil de l’amitié ! Je rentrai à mon hôtel, et le lendemain, je descendis chez mon père. Je lui dis : « J’ai enfin retrouvé mon petit frère, après avoir eu le