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pressé. » Il va payer et sort. Je ne venais que finir ma tasse ; je me levai, qu’il était disparu.

En sortant du café, je tombai sur le pavé. Tout mon corps se tortillait, j’étais en double ; des coliques me tordaient les boyaux. On vint à mon secours ; le monde du café, je crois, me fit porter à notre hôpital, au Gros-Caillou, et je fus de suite traité. On me fit boire je ne sais quoi, on me fit bassiner un bon lit, et l’on fit venir M. Suze, le premier médecin, très grêlé et borgne, un excellent homme. Il s’aperçut de suite que j’étais empoisonné ; il ordonna un bain et des frictions avec de l’huile qui infectait. Un infirmier, bras nus, me frottait le ventre à tour de bras ; un autre était tout prêt pour le relayer ; et ainsi toute la nuit et tout le jour, pendant huit jours. Et les coliques ne se passaient pas.

Il fallut mettre les ventouses sur le ventre, souffler avec un soufflet ; et, lorsque le feu était éteint, on coupait la peau avec un canif. Et puis on mettait un bocal renversé sur mon ventre pour pomper le sang. On m’épuisa de cette manière que l’on pouvait voir, avec une chandelle, au travers de mon corps. Et les infirmiers de frotter nuit et jour, et de me changer de draps quatre fois par jour, à cause des sueurs qui sortaient. Tous les matins, je donnais 24 sous à mes deux infirmiers pour leurs bons soins, M. Suze venait trois fois par jour. Et toujours