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nos pièces. Il envoya un parlementaire pour sommer le chef du fort de se rendre, mais la réponse ne fut pas en notre faveur ; il fallut agir de finesse. Il choisit des bons tirailleurs et leur donna des vivres et des cartouches, les plaça dans des fentes, et leur fit faire des niches dans des roches qui dominaient le fort. Leur feu tombait sur le dos des soldats ; ils ne pouvaient faire aucun mouvement dans leur cour. Le même jour, il découvrit à gauche du fort une roche plate très large. Il en fit de suite faire la reconnaissance pour y monter deux pièces. Les hommes, les cordages, tout fut mis à l’œuvre, et les deux pièces placées sur cette plate-forme qui dominait de plus de cent pieds le fort. Elles le foudroyaient à mitraille, et ils ne pouvaient sortir dans le jour de leurs casemates ; mais il restait nos pièces et nos caissons qu’il fallait passer.

Dès que Bonaparte apprit que les chevaux du train étaient passés, il fit ses préparatifs pour faire passer son artillerie sous les murs du fort ; il fit empailler les roues et tout ce qui pouvait faire du bruit, et jusqu’à nos souliers pour ne pas éveiller l’attention. Tout fut prêt à minuit. Les canonniers de notre demi-brigade demandèrent des grenadiers pour le passage de leur artillerie, et l’on nomma les vingt hommes qui avaient monté le mont Saint-Bernard, et ça leur fut accordé. Je fus du nombre avec le même canonnier qu’au passage du Saint-Bernard, il me mit