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DU CAPITAINE COIGNET.

nous reçûmes de ces hommes vénérables un seau de vin pour douze hommes, un quarteron de fromage de Gruyère et une livre de pain ; on nous mit dans des corridors très larges. Ces bons religieux nous firent tout ce qui dépendait d’eux, et je crois qu’ils furent bien traités. Pour notre compte, nous serrâmes les mains de ces bons pères en les quittant, et nous embrassions leurs chiens qui nous caressaient comme s’ils nous connaissaient. Je ne puis trouver d’expressions dans mon intelligence pour pouvoir exprimer toute la vénération que je porte à ces hommes.

Nos officiers décidèrent de prendre nos pièces pour les descendre et notre tâche fut terminée là. Notre brave capitaine Merle fut désigné pour conduire les trois compagnies. On passe sur le lac qui est au pied du couvent, où nous vîmes, en une place, que la glace était trouée. Le bon religieux qui nous fit faire le tour nous dit que c’était la première fois depuis quarante ans qu’il avait vu l’eau. Il serra la main de notre capitaine et nous salua tous. On redescend à pic ; en deux heures, on arrive à Saint-Rémy. Ce village est tout à fait dans des enfers de neige ; les maisons sont très basses et couvertes en laves très larges, nous y passâmes la nuit. Je me fourrai dans le fond d’une écurie où je trouvai de la paille, et je passai une bonne nuit avec une vingtaine de mes camarades ; nous n’eûmes