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les canons du fort de Tortonne. Nous traversâmes de longs défilés. L’obscurité était complète ; on ne voyait pas son plus proche camarade.

Bientôt nous arrivâmes dans des terres labourées. Là, il nous fut permis de parler, mais il nous fut encore défendu de faire du bruit et d’allumer du feu. Il fallut se coucher entre de grosses mottes de terre, la tête sur le sac, et dans cette position, attendre le jour.

Le matin, on nous fit partir le ventre vide, et descendre vers des marécages coupés de fossés et traversés par un grand ruisseau. Nous rencontrâmes des villages tout ravagés : pas de vivres ! Les maisons étaient désertes. Nous étions accablés de fatigue et de faim !

Nous sortîmes de ces bas-fonds pour remonter sur notre gauche, et nous trouvâmes un village entouré de vergers et d’enclos. Heureusement, il y avait de la farine, un peu de pain et quelques bestiaux. Sans cela, nous serions morts d’épuisement. On nous dit que ce village s’appelait le village de Marengo.

Le 12, nos deux autres demi-brigades, la 24e et la 43e, vinrent appuyer notre droite, et voilà toute notre division réunie.

Le même jour, au matin, on entendit battre la breloque. Quelle joie pour nous ! Dix-sept fourgons de pain venaient d’arriver : tout le monde voulait aller à la corvée. Mais quel fut notre désappointement : Ce pain était moisi et tout bleuâtre. Pourtant, il fallut s’en contenter.