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fonctionnaires ; elle monta l’escalier d’un pas lent. Sa figure était pâle et maigre, son air soucieux et souffrant. Un trône lui avait été préparé dans le grand salon qui pouvait contenir trois cents personnes ; c’est là qu’elle reçut les hommages des fonctionnaires publics et de tous ceux qui vinrent la voir.

Ma mission remplie, je m’étais retiré pour me réunir au corps des officiers en demi-solde ; nous arrivâmes à notre tour pour être présentés à cette princesse, fille du malheureux Louis XVI, victime des horreurs révolutionnaires qui ont souillé la France d’un sang dont la tache ne s’effacera jamais. Tandis que nous étions là, dans cette salle immense, formant le demi-cercle devant la princesse, il arrive une grande dame, au teint mat, qui se fait annoncer pour lui faire hommage d’un anneau provenant, disait la dame, des ancêtres de la famille royale. Une dame d’honneur vient rendre compte à la duchesse de cette visite inattendue et de son objet : « Faites retirer cette femme », s’écria la duchesse ; et la pauvre dame, que la plupart des assistants reconnurent et nommèrent tout bas, fut obligée de se retirer avec sa courte honte et son anneau royal. Cela fit jaser pendant huit jours toutes les commères de la ville.

En quittant Auxerre, la duchesse prit la route de Paris ; on l’y attendait, car elle jouait un grand rôle dans la politique du gouvernement. Tout fut organisé, dit-on, dans l’armée même, suivant ses conseils.