allaient se rendre pour le passage de la duchesse d’Angoulême, qui y était attendue. Cette proposition, quoique pas trop avantageuse, m’allait encore, faute de mieux. Mais pour aller à Dijon, il fallait demander et obtenir la permission. Demander était bien facile, pour obtenir ce n’était pas la même chose. Comment faire, me dis-je ? Si je vais solliciter, on me répondra : je vous défends de sortir de la ville. J’étais bien embarrassé et pour accepter la proposition qui m’était faite et pour la refuser. Une idée me vint : c’était de partir sans en donner avis à personne. Aussitôt conçu, aussitôt exécuté. Je ne dormis guère la nuit suivante. Je me levai, du reste, de bonne heure et après avoir fait mes petites dispositions, me voilà filant doucement, protégé par les ténèbres, avec mes deux quadrupèdes. À deux heures du matin, j’étais sur le pont d’Auxerre, et le lendemain matin, dès huit heures, j’arrivais à Dijon, à l’hôtel du Chapeau-Rouge, qui était le lieu indiqué pour le rendez-vous. Plusieurs officiers se trouvaient déjà là en m’attendant, et voulurent de suite voir mes chevaux. Pendant qu’ils arrivaient devant moi, le gros-major me dit : — Le maître de ces chevaux n’est donc pas venu ?
— Vous me prenez sans doute pour un domestique ? Jui dis-je d’un ton un peu sec. Je crois pourtant n’en avoir pas trop la figure. Vous vous trompez, je suis bien le propriétaire de ces deux bêtes. J’ai été militaire, et décoré avant vous, ne vous déplaise.