Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/402

Cette page n’a pas encore été corrigée
200

long de taille, culotte courte, des mollets comme un chevreuil, et au coin de l’oreille une loupe qui était aussi grosse qu’un melon d’un sou d’Appoigny. Il était risible à voir, mais je ne riais guère avec lui, quoiqu’il fût constamment honnête. « Notre ami, me disait-il, venez parler au maire, il a deux mots à vous dire. Ces deux mots, c’était toujours le même refrain : Vous conspirez, vous avez parlé mal du gouvernement. J’avais beau ne pas sortir de chez moi et ne rien dire à personne, on trouvait encore moyen de m’accuser.

Cependant les amateurs de chevaux commençaient à visiter mon écurie, et je me décidai à vendre au fils Robin, maître de poste, pour neuf cent vingt-quatre francs, mon beau cheval de bataille qui m’avait coûté le double. Il m’en restait encore deux dont je finis également par me défaire, Il m’arriva à cette occasion une aventure assez singulière et qui mérite d’être rapportée.

Le 60e régiment, dit de l’Yonne, eut ordre de partir d’Auxerre pour aller prendre garnison à Auxonne. Peu de jours après son arrivée dans cette dernière ville, je reçus une lettre du chirurgien-major que j’avais connu ici : il me disait de lui conduire mes deux chevaux, si le prix de douze cents francs pouvait me convenir ; on m’offrait de plus quatre-vingts francs pour les frais de voyage. « Le major en prend un, m’écrivait-il, et le commandant l’autre. » Mais il me fallait nécessairement aller à Dijon, et les deux officiers