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— Bah ! vous faites l’ignorant ; mais vous ne l’êtes pas.

— Il a gardé son cheval, dit un autre, parce qu’il attend la capote-grise. On dit qu’il revient.

J’ignorais complètement les projets de Napoléon, et je m’étonnais beaucoup de les entendre raisonner de la sorte à une époque où il était si imprudent de parler et si aisé de se compromettre.

Je ne disais rien, mais j’avoue que je prenais plaisir à entendre parler sur ce chapitre-là. Le bruit même de ces nouvelles qui se colportaient de bouche en bouche, fit luire dans mon esprit une joie secrète et quelques lueurs d’espérance. Quand je rentrai chez moi, j’étais tout ému, tout plein de la pensée et du désir de revoir mon empereur. De ce moment-là je ne cessai même pas d’avoir en moi comme un vague pressentiment de son retour ; et, dans cette prévision, je pressais M. Maret de faire vider mon procès. À cette occasion, je lui dis quelque chose des bruits qui circulaient.

— Vous serez bientôt satisfait, me dit-il. Je me contentai de sourire. M. Maret s’en apercut et il ajouta : Je vous vois vous réjouir d’avance, vieux grognard ; vous voilà prêt, je gage, à monter à cheval. S’il revenait, partiriez-vous de bon cœur ?

Je ne répondis que par quelques exclamations très-affirmatives. J’eus un moment le cœur ému et j’éprouvais un saisissement qui me coupait la parole.