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moitié, mais au tiers de son chiffre normal. Bon gré mal gré, il fallait se serrer le ventre, et cette vie dura près de sept ans. C’était plus que suffisant pour paraître long. On réclama de toutes parts, mais nos plaintes furent inutiles. Le brave général Foy, du haut de la tribune, leur criait : « Messieurs les émigrés, laissez donc ramasser à ces pauvres légionnaires la mie de pain qui tombe de votre table. » Tl n’en fallut pas moins subir notre triste sort.

Un jour, le général commandant le département fit appeler tous les officiers en demi-solde. Il nous demanda s’il s’en trouvait parmi nous quelques-uns de bonne volonté pour conduire des déserteurs à Sarrelouis. Voyant que personne ne se présentait, je pris la parole :

— C’est moi, dis-je, qui me charge de les conduire. Je ne demande avec moi que deux officiers. Je ferai le voyage, mais à condition que j’irai à cheval, et que les rations pour mon cheval me seront comptées,

— Cela suffit, me dit le général.

On m’adjoignit deux officiers : MM. Bazin et Guyard, et je me mis en route pour Sarrelouis.

De retour, lorsqu’il s’agit de me payer, on ne voulut pas me tenir compte de mes rations. Je réclamai ; on me répondit que le gouvernement ne connaissait pas d’homme à cheval pour conduire des conscrits et j’en fus pour mes frais. Allons, me dis-je, voilà que j’ai encore trayaillé cette fois pour le roi de Prusse. Il faut