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Rassuré par ces promesses, je pris un peu patience ; je m’attendais que le tribunal ne tarderait pas à me rendre justice.

Cependant, je me casai dans une maison appartenant a M. Lesseré, où sont maintenant établis ses beaux magasins, sur la place des Fontaines. Ce logement était alors bien modeste, mais le prix rachetait un peu cela : je ne payais rien. Je louai une sangle, un matelas et je me fis là une espèce de lit de camp. Je fus assez heureux pour rencontrer encore dans ce vieux bâtiment une petite écurie pour loger mon cheval. Ma vie, mes habitudes se trouvaient complètement changées ; chaque dimanche j’allais, sans manquer, à la messe, dans la crainte de me voir privé de ma modique demi-solde. Il fallait, de plus, aller trouver, chaque semaine, le général commandant le département et faire aussi des visites assidues à M. le préfet. Comme c’était amusant ! Ajoutez à cela que, réduit à une maigre paie de soixante-treize francs par mois, on ne tarda pas à nous rogner encore les ongles au moyen d’une retenue de deux et demi pour cent sur le traitement fixe et autant sur la croix d’honneur. Ce ne fut pas tout : à chaque trimestre on augmentait le chiffre de nos retenues. On arriva ainsi successivement à nous rogner jusqu’à cent vingt-cing francs par an sur notre légion d’honneur, indépendamment des deux et demi qui continuaient à nous être déduits sur le traitement de demi-solde, de manière que notre pension se trouvait réduite non plus à la