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marchions bon train, et j’arrive avec ma petite livrée, car mon domestique portait la livrée d’ordonnance, cœur haut, fortune basse ; mais il fallait bien paraître. Je mets pied à terre à la porte du moulin ; moi, vieux grognard, j’éprouvais un saisissement de cœur à la vue de tout ce que je reconnaissais. Mes membres tremblaient, et je cours chez mes bons maîtres leur sauter au cou et les revoir enfin. Madame Potier était au lit. Je demandai la permission de la voir. — Entrez, me cria-t-elle tout émue, entrez tout de suite. Malheureux enfant ! Pourquoi ne nous avoir pas donné de vos nouvelles et demandé de l’argent ?

— J’ai eu grand tort, madame, mais vous voyez qu’en ce moment je ne manque de rien. Je suis votre ouvrage. Je vous dois mon existence, ma fortune ; c’est vous et M. Potier qui avez fait de moi un homme.

— Vous avez bien souffert ?

— Tout ce qu’un homme peut endurer, je l’ai enduré.

— Je suis heureuse de vous voir sous un pareil uniforme. Vous avez un beau grade ?

— Capitaine à l’état-major général de l’empereur et le premier décoré de la légion-d’honneur. Vous voyez que vous m’avez porté bonheur.

— C’est vous, c’est votre bon courage qui vous a sauvé. Mon mari se fait une fête de vous présenter à nos amis.

M. Potier m’accueillit, de son côté, comme un bon