Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/277

Cette page n’a pas encore été corrigée
75

prix que j’avais désigné, non compris le café, qui nous coûtait un franc par tête. Le propriétaire de la maison eut aussi la bonté de loger nos chevaux et de leur faire donner des rations de foin et d’avoine, ce dont les pauvres bêtes avaient été privées depuis Wilna. Quel bonheur pour elles de pouvoir mordre dans une botte de foin ! Quel bonheur pour nous de coucher sur de la paille et dans une chambre bien chauffée !

Je fis venir un médecin que je consultai au sujet de mon pied gauche qui était complétement gelé. Il décida qu’on fendrait ma botte, qu’on entourerait le pied malade avec des linges, et qu’on le chausserait ensuite d’une botte fourrée en peau de lapin. Un bottier fut appelé, et je lui expliquai ce qu’il me fallait :

— Faites-moi ma nouvelle botte cette nuit même, lui dis-je, et je vous donne vingt francs.

— Demain, à huit heures, vous l’aurez, répondit-il.

En effet, le lendemain à l’heure dite, le bottier et le médecin arrivaient ensemble. Ma botte fut fendue, et on en retira mon pied, qui semblait celui d’un nouveau-né, dépouillé de sa peau et de ses ongles. Je le montrai aux maîtres de la maison, qui m’offrirent du linge bien blanc et très fin pour l’envelopper. Lorsque mon pied fut pansé et emprisonné dans sa nouvelle botte bien fourrée, je demandai au médecin le prix du service qu’il venait de me rendre.

— Ce service ne se paie pas, me dit-il, mais…

— Pas de mais.