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sortirons de la ville, car l’ennemi arrive sur les hauteurs, et nous serons bombardés au point du jour. » Rentré dans mon logement, je fis mes préparatifs et engageai mon camarade à en faire autant ; mais il n’entendait pas de cette oreille : le malheureux se trouvait si chaudement après avoir été gelé, qu’il préférait rester au pouvoir de l’ennemi. À trois heures, je fus le trouver.

— Allons, lui dis-je, partons !

— Non, je reste.

— Je te tue si tu ne me suis pas.

— Eh bien ! tue-moi !

Je fus obligé de dégainer, et lui appliquai de si forts coups du plat de mon sabre, que je le forçai de se lever et de me suivre. C’était un de mes bons camarades que je ne voulais pas, pour tout au monde, laisser au pouvoir de l’ennemi. Il était temps, car au moment où nous nous apprêtions à partir, les Russes faisaient tous leurs efforts pour prendre la ville. Ils en forcèrent les portes, et nous n’eûmes que le temps de fuir par le côté opposé. Ils y commirent toutes sortes d’atrocités. Heureusement l’intrépide Ney, aidé de la garde impériale, arrêta quelque peu nos vainqueurs en déployant ses ailes à droite et à gauche de Wilna. Il fit si bonne contenance qu’il empêcha l’ennemi de nous charger trop vivement au delà de la ville ; néanmoins notre déroute fut complète. On ne peut se faire une idée juste de ce que nous perdîmes ce jour-là. Toute notre armée