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trophées de Moscou, avec ordre de les faire jeter dans un lac droite de la route et de livrer le trésor aux traînards. Ces malheureux se jetèrent dessus et mirent tout au pillage ; les trois quarts y trouvèrent la mort par leur avidité ; ils tombaient gelés sous le poids de leurs fardeaux. Dans l’état de faiblesse où nous nous trouvions, un homme ne pouvait pas porter cinq cents francs sur lui. Je possédais de mes petites économies dix-sept cents francs dans mon porte-manteau, et je sentais mon cheval s’affaiblir sous ce poids. Je fus trouver mes vieux grognards, et leur proposai de m’en débarrasser. « Donnez-moi vingt francs d’or, leur dis-je, et je vous donnerai vingt-cing francs. » Tous s’en firent un plaisir et me débarrassèrent si bien que toute ma fortune se monta à quatre-vingt-trois napoléons.

Le roi de Naples arriva devant Wilna le 8 décembre, et nous avec la garde, nous arrivâmes le 10 aux portes de la ville que nous trouvâmes barricadées avec de fortes pièces de bois. Il fallut des efforts inouis pour escalader et pénétrer dans l’intérieur, ce qui nous fit perdre du temps et éprouver des pertes considérables. C’est la que le froid fut le plus rigoureux. L’ennemi nous serrait de près et ne nous donnait pas le temps de nous reposer. À peine je venais de me loger avec un de mes camarades dans un collège dont les classes étaient bien chauffées, que j’allai trouver le général Monthyon pour prendre ses ordres ; « Tenez-vous prêt, me dit-il, pour demain à quatre heures du matin ; nous