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leur sommeil. Ils furent saisis, désarmés, garrotés, placés dans des petites charrettes basses et amenés devant le colonel.

Celui-ci, après les avoir fait délier et placer sur un rang, leur annonça qu’il allait les former par ordinaires et demanda s’il y avait parmi eux des sergents et des caporaux. À ces mots, deux individus sortirent des rangs et montrèrent des galons de sergent cachés sous leurs capotes. Trois caporaux se firent de même reconnaître. Ensuite on présenta aux soldats des billets blancs et des billets noirs en égale quantité. Ceux qui amenaient les billets noirs étaient placés à côté des deux sergents et des trois caporaux. Quand le tirage fut fini, le colonel se tournant vers eux :

Vous avez, leur dit-il, pillé, volé, incendié, vous avez fait feu sur votre commandant. La loi vous condamnait tous à la peine de mort. Je pouvais vous faire tous fusiller. J’en épargne la moitié ; mais l’autre va subir son châtiment. Que cela serve d’exemple.

Et, s’adressant à moi : Commandant, faites charger les armes à votre bataillon, mon adjoint commandera le feu.

Je me souviendrai souvent de cette terrible scène, qui fut comme l’étrenne de mes épaulettes de lieutenant.

Le cœur navré de chagrin, je continuai ma route. Chaque jour je croyais toucher au terme. Le corps du maréchal Davoust avait une grande avance sur moi, et