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Un peu plus tard, une file tout entière, emportée par un boulet, tomba sur moi et me jeta à la renverse. La poignée de mon sabre et le coin de ma giberne furent enlevés du même coup.

Déjà tous nos canouniers étaient tués. Le général Dorsenne prit douze grenadiers pour servir les deux pièces qui étaient devant nous, et leur donna la croix pour les encourager ; mais tous ces malheureux furent tués à leur tour. Les canons étaient broyés et gisaient à terre, semblables à d’énormes tisons.

Un obus éclata près de notre brave général et le couvrit de terre ; il se releva : — Votre général n’est pas mort, nous cria-t-il ; comptez toujours sur lui. Il avait déjà perdu deux chevaux dans le commencement de la journée.

Ajouterai-je ici un affreux détail ? Un boulet emporta de nouveau toute une file voisine de moi. Je reçus un choc violent, mon fusil tomba ; je ne sentais plus mon bras droit. En regardant, je vis un lambeau sanglant attaché à la hauteur de la saignée, comme si j’avais eu le bras fracassé. Ce n’était qu’un débris de mes pauvres camarades qui avait été lancé contre moi. Le lieutenant, me secouant la main, me dit : — Allons, votre bras n’est qu’engourdi. Je me rassurai et pris mon fusil de la main gauche. J’en fus quitte pour une frayeur assez naturelle et pour une douleur que je ressentis longtemps.

Cependant nos pertes étaient considérables : il fallut