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les Anglais, ne sachant pas la guerre finie, expédiaient aux Russes.

Un jour, nous reçûmes l’ordre de planter des arbres dans la grande rue et de la sabler, pour recevoir la reine de Prusse, qui venait visiter Napoléon. Elle arriva à dix heures du soir. Qu’elle était belle ! On pouvait dire : belle reine et vilain roi. Mais je crois qu’elle était roi et reine.

L’empereur vint la recevoir au bas du perron, et lui présenta la main. Elle passa la nuit au palais. Cependant, elle ne put faire plier Napoléon. On nous dit qu’il l’avait nommée reine de Silésie. Ce n’était pas cela qu’elle voulait.

J’eus le bonheur de me trouver, le soir, de faction au bas du perron, de façon à la voir de près, et, le lendemain, quand elle sortit, j’occupais la même porte. Quelle charmante figure ! quelle démarche majestueuse ! J’avais alors trente ans, et j’aurais donné une de mes deux oreilles pour rester avec elle aussi longtemps que l’empereur.

Ce fut la dernière faction que je fis comme soidat.

Le général Dorsenne, qui était colonel-général des grenadiers à pied de la garde, reçut l’ordre de nous faire distribuer des souliers et des chemises qui se trouvaient dans les magasins russes et prussiens, et de nous passer en revue, avant que nous ne quittions Kœnigsberg. Il fit prévenir, à son tour, les capitaines de passer