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a déjà volé son pot-au-feu. Heureusement que ses cantines viennent d’arriver. Il a fini par en rire. Mais il ne faudrait pas abuser, car il a le ventre creux comme vous autres. — Mon lieutenant, répondis-je, ne dites rien, donnez-moi ce que je vous demande et dans une heure je vous rapporte une grillade.

Ainsi dit, ainsi fait ; je tins scrupuleusement ma promesse. Le colonel Frédéric et mon cher capitaine Renard eurent chacun un rognon. Tout fut partagé en famille.

Vers le soir, on apprit que les grenadiers à cheval avaient été à la maraude, sur l’ordre de l’empereur, et qu’ils avaient rapporté des pommes de terre. La distribution nous en fut faite ; nous en eûmes vingt par ordinaire de dix-huit hommes. On peut juger par là de notre pénurie.

Après deux jours de repos, l’empereur fit appeler le comte Dorsenne et lui dit : Tu vas partir avec ma garde à pied et rentrer à Varsovie. Mais il ne faut pas suivre le même chemin, tu perdrais tous mes vieux grognards. Voilà la carte, cherche ta route et fais-moi ton rapport sur ce qui adviendra.

Nous partîmes dès le lendemain. Autant que possible nous allions d’un bois à l’autre ; car, dans les bois, marchant sur la mousse, on n’enfonçait guère. Malheureusement il fallait par fois en sortir, et dès que nous entrions dans les terres, nous enfoncions d’une facon déplorable. C’était comme un mortier.