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trouver le terme de nos fatigues, la fin de nos épouvantables misères.

Il était impossible de nous loger dans le village qui se trouvait déjà encombré de monde, nous campâmes à l’entrée.

Les premiers arrivés allèrent chercher de la paille pour établir notre bivouac et étendre sous nos pieds. De paille, il n’y en avait plus. On fut obligé de piller quelques granges et de prendre des gerbes de blé ; elles étaient du reste indispensables pour nous protéger contre l’humidité et nous empêcher d’enfoncer dans la boue.

Je pris une grande part à ce pillage et je fis bien des voyages, du bivouac aux granges que nous dévastions. Dans l’un d’eux, je rapportai une auge en bois que les grenadiers à cheval avaient rebutée. Mes camarades, qui étaient des colosses auprès de moi, tremblaient de me voir plier sous cet énorme fardeau, mais rien ne m’arrêtait. J’arrivai sain et sauf au lieu du campement et l’auge disparut dans les flammes de notre feu ; j’eus encore la force de fureter çà et là, si bien que je trouvai des œufs dans un tas de gerbes et que je finis par me procurer un pot pour les faire cuire. — Dieu m’avait favorisé sous le rapport de la constitution, j’avais les jambes d’un cheval arabe, et l’adversité n’abattait pas mon courage. Aussi, je pus souffrir de rudes épreuves et des angoisses que nul mot ne saurait exprimer.