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étaient à peu près dégelées. La tâche était rude, comment l’accomplir ? Nous avisâmes une énorme palissade qui s’élevait au milieu des eaux et sur toute la largeur. Elle était faite de branches entrelacées, et soutenues de distance en distance par des pieux énormes. Nous en profitâmes avec joie et voici comment. Nous nous servions des branches étendues horizontalement pour appuyer le bout de nos pieds, et tournés dans le sens de la palissade, nous avancions en nous accrochant de temps en temps aux pieux. De cette façon il fut possible de traverser le marais à pied sec, mais un par un avec grand’peine et une extrême lenteur.

Un peu plus loin, un ruisseau, qui, je crois, descendait vers le marais, vint encore nous barrer le chemin. Heureusement, la plupart des nôtres finirent par le franchir à l’aide de sauts vigoureux. Un pauvre grenadier laissa, durant ie passage, échapper son fusil. Il ne voulut pas l’abandonner et fut obligé d’entrer dans l’eau glacée pour chercher à tâtons son arme fidèle, que les eaux avaient entraînée un peu plus loin. Qu’on juge de l’état où il devait se trouver !

Un soir, à la nuit fermée, nous rencontrâmes un bivouac abandonné par les Russes. La paille en était hâchée et menue comme des balles d’avoine, mais ce gîte valait mieux encore que la terre humide et glacée.

Nous déposâmes nos sacs sous des noisetiers. En appuyant le mien je sens une légère éminence, je détourne la paille, je tâte et je découvre deux pains de