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Vers les dix heures du matin, un soleil magnifique, le beau soleil d’Austerlitz, illumina tout le champ de bataille. Nous étions alors sur un large plateau : et nous pûmes apercevoir dans le lointain, en face de nous, un superbe carrosse attelé de chevaux blancs, fuyant au triple galop : c’était, nous dit-on, la reine de Prusse qui se sauvait.

Napoléon, voyant les progrès de son armée, suspendit l’attaque pendant une heure. Les feux s’éteignirent peu à peu. La bataille semblait comme finie. Tout à coup, avant que l’empereur eût donné le signal de reprendre les hostilités, nous entendîmes vers notre gauche une fusillade épouvantable. L’empereur dépêcha un officier pour savoir ce qui se passait. Il était en grande colère, prenait force tabac, et piétinait devant nos rangs. L’officier revint au galop et lui dit : Sire, c’est le maréchal Ney, qui, à la tête de ses grenadiers et de ses voltigeurs, est aux prises avec une énorme masse de cavalerie. Aussitôt l’ordre fut donné de marcher en avant. L’empereur voulut, par lui-même, juger de ce qui était arrivé, et quand il l’eut vu de ses yeux, il ne grogna plus.

De tous côtés nous recevions des renforts ; le prince Murat survint à la tête de ses dragons et de ses cuirassiers. Les chevaux semblaient éreintés, ils tendaient la langue. Mais l’empereur ne leur laissa pas de répit. Prince, s’écria-t-il, poursuivez votre charge à outrance. — Notre magnifique cavalerie partit à ces mots, culbuta tout devant elle, et ramena une division tout entière de