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Cette fois je ne revis pas ma vieille caserne des Feuillants. Elle avait été, je crois, démolie et les terrains vendus. Voici comment on nous distribua : Un bataillon devait s’installer dans la caserne du quai d’Orsay, pour faire le service des Tuileries ; les trois autres séjournaient à Courbevoie, et faisaient le service de Saint-Cloud quand l’empereur s’y trouvait. Chaque bataillon à son tour se rendait à Paris, nous y restions un mois chacun. Les chasseurs étaient disposés d’une manière analogue ; un de leurs bataillons résidait à l’École militaire, et les autres à Rueil.

L’empereur nous fit tous habiller à neuf et nous passa plusieurs fois en revue. La bonne ville de Paris, voulant sans doute nous dédommager des malheurs de notre arrivée, nous donna un festin sous les galeries de la place Royale. Rien n’y manquait, et le soir nous eûmes comédie gratis à la Porte-Saint-Martin. On y représentait le passage du mont Saint-Bernard. Nous vîmes les bons moines descendre la montagne avec leurs gros chiens à côté d’eux. Je croyais être encore en 1800, à traîner ma pièce de canon ; je tapais des pieds et des mains. Mes camarades me disaient : Vous êtes donc fou, ce soir ! — Non, leur répondais-je, mais je les ai vus au Saint-Bernard ces beaux chiens et ces bons capucins, tels que je les revois aujourd’hui ! Ce sont pour moi de vieilles et chères connaissances.

L’appel ne se fit qu’à deux heures du matin ; toutes les petites peccadilles furent pardonnées.