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paie pour du pain blanc, je veux en avoir. Tu entends, Lannes, tu enverras ton aide-de-camp chez le fournisseur afin qu’il vienne me parler.

En quittant la caserne, il nous dit qu’il nous passerait en revue le dimanche suivant. J’ai besoin de vous voir, ajouta-t-il, il y a des mécontents parmi vous, je recevrai leurs réclamations.

Le colonel Dorsenne se donna bien du mouvement pour préparer la garde à cette revue. Le magasin d’habillement fut bouleversé, et le matin, à dix heures, il passa son inspection. Les officiers tremblaient de crainte. À onze heures, nous partimes pour les Tuileries, et à midi le consul parut. Il monta sur un cheval blanc que l’on disait avoir servi à Louis XVI. C’était un animal de la plus grande beauté ; jamais, peut-être, Bonaparte n’en monta de plus superbe.

Il fit ouvrir les rangs aux grenadiers de la garde, les traversa au pas, reçut beaucoup de pétitions qu’il prenait lui-même pour les donner au général Lannes, et continua la revue des autres corps au galop.

En rentrant, nous trouvâmes des tonneaux de vin à la caserne ; on nous en fit la distribution. Chacun eut son litre, et nous apprîmes que l’on fabriquait des croix d’honneur. Ce fut une grande joie dans la garde, car beaucoup surent qu’ils devaient être décorés ; j’étais de ce nombre. Bientôt l’avis officiel nous en fut donné, je crois que nous étions dix-huit cents dans toute la garde désignés pour recevoir la croix.