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déshonorer, nous avons été assez malheureux sans cela.

— Mon ami, répond-elle, il va venir après l’appel ; tu jugeras toi-même.

En effet, j’arrive, elle le fait cacher. — Mon frère n’est donc pas venu ? dis-je en entrant.

— Si, mais il prétend que vous n’êtes pas mon frère.

— Eh bien ! il faut lui dire que c’est moi qu’il a emmené de Druyes et qu’il a conduit à Étais pour me louer ; il faut lui dire qu’il avait alors du mal au bras, etc., etc.

Là-dessus, il sort de sa cachette, se précipite vers moi, et nous voilà tous les trois dans les bras l’un de l’autre, pleurant si fort que tout le monde de la maison accourt pour nous voir, C’était, il est vrai, un spectacle touchant que des malheureux se retrouvant après dix-sept ans de séparation.

L’émotion fut si grande qu’elle devint fatale à ma sœur et à mon frère ; huit jours après, ma pauvre sœur tomba malade, if fallut la porter à l’hôpital, où elle mourut ; mon frère la suivit de près. Il ne put se consoler de sa mort. Bientôt, je fus obligé de le renvoyer au pays, où il succomba à son tour. En trois mois je les perdis tous deux. Voilà des malheurs que je n’oublierai jamais !

Ma sœur, avant de mourir, m’apprit comment notre belle-mère l’avait abandonnée dans les bois de Druyes, et comment elle avait été retrouvée par le père Thibault, meunier à Beauvoir. Malheureuse fille ! je lui