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t’ai pas oublié. Tu auras une petite machine à ton habit. Et vous, Renard, tâchez de le garder dans votre compagnie, c’est un soldat éprouvé.

Je remerciai le ministre et nous sortîmes. De là, nous allâmes chez le général Davoust, qui était alors colonel-général des grenadiers à pied. Mon capitaine lui expliqua qu’il voulait me garder dans sa compagnie quoique je n’eusse pas la taille, parce que j’avais un fusil d’honneur et de bonnes notes. — Eh bien ! dit le général Davoust, il faut tromper la toise. Voyons combien il lui manque… six lignes !… avec deux jeux de cartes dans chacun de ses bas, on comblera la différence.

Mon capitaine accepta ce conseil avec empressement. Il était vif comme un poisson et menait tout grand train. Il me procura des cartes, m’aida à les arranger sous mes pieds, et le soir je passai sous la toise. Mon capitaine se redressait en face de moi, croyant me faire grandir ; mais je n’avais pas besoin de ses encouragements, je me tenais droit comme un piquet, et, grâce à la ruse employée, je sortis victorieux de l’épreuve. J’étais censé avoir les cinq pieds six pou- ces exigés pour être grenadier : et je fus admis aussitôt dans la compagnie du capitaine Renard. Il était aussi fier que moi d’avoir réussi dans son dessein.

Une fois que je fus admis, il envoya chercher son sergent-major, et lui dit de me placer dans l’ordinaire le plus faible. Nous avons, ajouta-t-il, le plus grand des grenadiers de la garde : nous aurons aussi le plus petit.