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et se jeta sur un tas d’étoffes où il ne tarda pas à sombrer dans un profond sommeil.

Tout à coup, il s’éveilla en sursaut. La nuit était profonde. Il s’assit sur son lit, prêta l’oreille.

— Viendrait-on m’assassiner ? se dit-il.

Il alluma la petite lampe électrique qui ne le quittait jamais. La tente apparut, paisible. Par la fente de la portière baissée, une vague clarté glissait. Bakar dormait. Cependant, il n’avait pas l’impression qu’il avait rêvé. Il lui avait semblé percevoir un frôlement tout près de lui. Et, maintenant, il percevait quelque chose qui lui paraissait un souffle précipité, en dehors, le long de la paroi de la tente. Il allait se décider à se lever lorsqu'il resta cloué sur place. Une voix lui parvenait, toute proche et cependant étouffée, une voix de femme, grave, très basse, qui fredonnait en sourdine :

Que personne ne va voire
Que la fille du geôlier !
On dit, dans toute la ville,
Que demain vous mourrez !

C’était la suite de sa chanson de tout à l’heure qu’on lui renvoyait, à la façon d’une réponse. Et c’était une femme ! Qui cela pouvait-il être, sinon Catherine Chatel ? Cette fois, n’y tentant plus, il bondit hors de la tente. Mais il eut beau tourner tout autour, fouiller, chercher, il ne vit rien. La nuit paisible enveloppait le camp qui reposait dans un grand silence.

Il prit la résolution de ne pas se rendormir. Mais, en dépit de sa volonté, il lui arriva plusieurs fois de somnoler et de perdre la conscience des choses. De nouveau, il s’éveilla. Il venait de rêver qu’on pénétrait dans la tente. Il poussa un cri, saisit son revolver et resta stupide. Il n’y avait personne, que Bakar que son cri avait arraché de son sommeil et qui le considérait d’un air surpris. Mais quelqu’un était venu, il n’y avait pas à en douter. Car, au milieu du tapis en poil de chèvre qui recouvrait le sol, s’étalait un petit reclan-