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et pourquoi m’es-tu si chère, à moi qui ne dois plus aimer et qui vais mourir ? »

En outre des lettres qu’ils s’adressaient tous les trois ou quatre jours, George Sand lui envoyait ses Lettres d’un Voyageur : la première, le 29 avril ; la deuxième, dans les premiers jours de juin, par l’entremise de Buloz :

«…..Buloz, écrit le 15 juin Alfred de Musset à George Sand, vient de m’apporter la lettre que tu lui as envoyée pour la Revue. Il me l’a lue en ânonnant, jusqu’à ce que, impatienté des coups d’épingles que sa lourde déclamation me donnait dans le cœur, je lui ai arraché le papier des mains, pour le finir à haute voix. Maintenant le voilà parti, et le cœur me bat si fort qu’il faut que je t’écrive ce que j’éprouve….. »

Puis, le 17 juin, « la seconde moitié du second volume de Jacques, » avec mission de la lire et d’y faire les coupures qu’il jugerait nécessaires[1]. C’est Musset qui s’occupait à Paris des affaires de George Sand, restée à Venise, voyait ses fournisseurs, s’entendait pour elle avec Buloz, et lui faisait expédier par ses éditeurs les sommes dont ils lui étaient redevables ; il était aidé en cela par Boucoiran.

D’autre part, il mandait ceci, dès le 30 avril, à son amie : « J’ai bien envie d’écrire notre histoire ; il me semble que cela me guérirait et m’élèverait le cœur. Je voudrais te bâtir un autel, fût-ce avec mes os ; mais j’attendrai ta permission formelle ». — Et le 12 mai, George Sand lui répondait : « Il m’est impossible de parler de moi dans un livre, dans la disposition d’esprit où je suis ; pour toi, fais ce que tu voudras, romans, sonnets, poèmes ; parle de moi comme tu l’entendras, je me livre à toi les yeux bandés ». — Ce projet, on le sait, est

  1. En tête de l’exemplaire de Jacques que possédait Alfred de Musset, se trouve cet envoi autographe : « George à Alfred ».