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ment laissé faire Ledru-Rollin qui la signa pour lui complaire, elle eut un tort immense, car il y allait de son honneur d’empêcher cet acte, pour ne pas être accusée de basse vengeance, et si elle ne le pouvait, elle eût au moins dû protester publiquement, afin d’éviter tout soupçon.

L’arrêt qui le frappait fut notifié à Alfred de Musset par cette lettre qui ne lui parvint que dans les premiers jours du mois de juin, M. Recurt, docteur-médecin, étant Ministre de l’Intérieur, M. Ledru-Rollin ayant été révoqué le 11 mai 1848[1] :

« Citoyen,

« J’ai le regret de vous annoncer que par un arrêté du 5 mai courant, le Ministre vous a admis à faire valoir vos droits à la retraite.

« Salut et Fraternité.

« Paris, 8 mai 1848.

« Le Secrétaire général, « CARTERET ».

Malgré les précautions prises en haut lieu, cette inqualifiable mise à pied ne tarda pas à être connue, et les journaux, à la seule exception de ceux payés par le gouvernement, se rangèrent du côté d’Alfred de Musset :

LES SALTIMBANQUES, no 2, juin 1848. — « Une brutale destitution vient de frapper Alfred de Musset ; on l’a traité comme un homme vulgaire ; il est vrai que tous les hommes sont égaux devant l’ordonnance du médecin ».

LA PROVIDENCE, 12 juin 1848. — « M. Alfred de Musset, bibliothécaire au Ministère de l’Intérieur, vient d’être révoqué de ses fonctions. Si nos informations sont exactes, cette nouvelle lui aurait été signifiée de la façon la plus inattendue et la plus blessante. Il est impossible de contenir la douleur que de pareils actes inspirent. La destitution de M. Lebrun et de M. Mignet était déjà un fait déplorable ; celle de M.

  1. Inséré au Moniteur Universel du 13 mai 1848.