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Le 21 juillet, il écrivait à son fidèle ami :

« Monsieur Alfred Tattet, à Baden, poste restante.

« Votre lettre, mon cher Alfred, est arrivée comme je n’étais pas à Paris, ce qui fait que ma réponse est en retard de quelques jours. Pour répondre d’abord à votre question sur ce qui regarde Madame…. (Affaire personnelle à Alfred Tattet)…. je crois que ce que je peux vous dire de mieux, c’est qu’il y a tantôt huit ou neuf mois, j’étais où vous êtes, aussi triste que vous, logé peut-être dans la chambre où vous êtes, passant la journée à maudire le plus beau, le plus bleu ciel du monde et toutes les verdures possibles. Je dessinais de mémoire le portrait de mon infidèle ; je vivais d’ennuis, de cigares et de pertes à la roulette. Je croyais que c’en était fait de moi pour toujours, que je n’en reviendrais jamais. Hélas ! Hélas ! Comme j’en suis revenu ! comme les cheveux m’ont repoussé sur la tête, le courage dans le ventre, l’indifférence dans le cœur, par dessus le marché ! Hélas ! A mon retour, je me portais on ne peut mieux ; et si je vous disais que le bon temps, c’est peut-être celui où l’on est chauve, désolé et pleurant ! Vous en viendrez là, mon ami. Je vous plains aujourd’hui bien sincèrement, parce que vous souffrez. Quand vous serez guéri, vous n’en serez pas fâché, soyez-en sûr. Tout ce qui fait vivre est bon et sain. Je vous promets de vous tenir au courant de tout ce que je pourrai savoir….

« Je travaille à force. Combien de temps comptez-vous rester à Bade ? Adieu. Je suis à vous.

« ALFRED DE MUSSET. »

Hélas ! Non, Alfred de Musset « n’en était pas revenu ». Quelque chose s’était brisé en lui, laissant une plaie qui saigna jusqu’à sa mort.

    etc… » Ce n’est pas elle l’innommée de la Lettre à Lamartine. Je crois qu’il faut remonter au moins à l’année 1828 pour la retrouver. Ce ne serait qu’un Souvenir, évoqué non par une rencontre, comme celui de 1841, mais cette fois par une mort. — Mme Wladimir Karenine donne son nom : Madame de Groiselliez (T. II, p. 28).