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me serve à quelque chose, car chaque nouveau jour de cette passion m’apprend à douter de mon libre arbitre….. Je compte sur vous aussi pour me rendre cette justice, qu’aux jours de ma plus grande douleur, je n’ai point accusé l’auteur de mes souffrances. Je vous l’ai dit, moi seule suis coupable et porte la peine d’une faute immense. En fuyant un pardon trop humiliant, je fais preuve de faiblesse et non de force….. »[1].

Peu après se produit un incident qui remet Pagello en scène et sur lequel nous n’avons pas de renseignement antérieur à cette lettre écrite par George Sand à Alfred Tattet :

« 14 février 1835.

« Monsieur,

« J’ai une affaire indispensable à terminer avec vous. Il s’agit d’une affaire d’argent dans laquelle je suis compromise d’honneur aux yeux de Pierre Pagello. J’ai besoin d’une attestation de vous et vous êtes trop galant homme pour me la refuser. Je sais que vous m’êtes extrêmement hostile, et j’ai peu sujet de vous bénir. Mais soyez sûr que j’ai trop le sentiment des convenances, pour vous en faire des reproches, et que jamais aucune vengeance de ma part ne cherchera à vous atteindre. Ayez donc, monsieur, la bonté de recevoir chez vous quatre tableaux qui appartiennent à Pierre Pagello et que je m’étais chargé de vendre. Voyant qu’il avait besoin d’argent, et sachant, par l’avis d’un expert, que les tableaux ne valaient rien, je lui en donnai la somme de deux mille francs, et j’y ajoutai le procédé de lui cacher le secours que [je] lui apportais. Je lui remis mille francs en argent et le tins quitte d’une somme plus forte qu’il me devait. Je crus devoir ces ménagements à sa position fâcheuse et délicate à Paris. Aujourd’hui, Pierre Pagello, averti par un de mes amis, me fait un grand crime de cette action et pense que je l’ai faite à dessein de la divulguer et d’avilir son nom ; d’abord, en racontant l’histoire telle qu’elle est, je n’ai point

  1. Cette lettre, datée du 19 janvier 1835, est publiée dans : Briefe hervorragender Zeitgenassen an Frantz Liszt…., herausgegeben von La Marra. Leipzig, Breitkopf und Härtel, 1895. 2 vol. in-8º. Tome I, p. 9.